La crise sanitaire révèle des inégalités numériques - François Aubriot - Lyon Demain

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Titre : La crise sanitaire révèle des inégalités numériques
Intervenant·e·s : François Aubriot - Gérald Bouchon - Juliette May
Lieu : Lyon Demain
Date : avril 2020
Durée : 6 min 30
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Licence de la transcription : Verbatim
Illustration : Proposition de logo pour les Logiciels Libres, Ponsfrilus, Wikimedia Commons - Licence Creative Commons By SA 2.5 et Licence GNU de documentation libre
NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Description

Cette crise sanitaire rend incontournable les outils numériques pour les entreprises ou les écoles. Mais ces outils sont parfois décriés pour les inégalités qu'ils peuvent créer…

Transcription

Gérald Bouchon : La mairie de Lyon dote 200 élèves des écoles élémentaires situées en réseau d’éducation prioritaire d’ordinateurs reconditionnés. Cette action doit permettre aux élèves de poursuivre l’école à domicile dans de bonnes conditions. Les ordinateurs ont été reconditionnés par l’association lyonnaise WeeeFund1 en lien avec Emmaüs Connect2, la communauté éducative et les associations du territoire.
Cette crise sanitaire, on s’en compte, rend incontournables les outils numériques, des outils parfois décriés pour les inégalités qu’ils peuvent aussi créer. Juliette May.

Juliette May : Eh oui. Télétravail, devoirs à distance, difficile de se passer du numérique pendant cette période de confinement. La question est donc : quel est notre rapport à ces outils ? Nous allons tenter d’y répondre avec François Aubriot, président du PLOSS Auvergne Rhône-Alpes [Professionnels du Libre et de l'Open Source Software en Rhône-Alpes Auvergne], qui œuvre en faveur des logiciels libres et de l’open source. Il est avec nous aujourd’hui. Bonjour François.

François Aubriot : Bonjour Juliette.

Juliette May : On sait qu’il y a des inégalités certaines concernant ces usages du numérique, notamment chez les élèves et les étudiants. Quelle est votre réflexion à ce sujet ?

François Aubriot : Je suis le papa d’un garçon qui est en CM2 et d’une fille qui est en 5e sur Lyon 2e.
Concernant les inégalités face au numérique, en fait cette période m’a fait observer, on va dire, deux domaines d’inégalités : tout d’abord l’inégalité en ce qui concerne les accès, que ce soit au niveau de la connexion internet ou du terminal permettant d’accéder aux devoirs qui sont donnés par les professeurs. Il faut savoir qu’on ne peut pas non plus tout faire depuis un téléphone même si ceux-là sont quasiment aussi puissants que les ordinateurs maintenant.
Cette période a également mis en exergue une inégalité par rapport aux professeurs qui ne sont peut-être pas tous aussi compétents ou en tout cas formés à l’utilisation du numérique dans le cadre de devoirs qui sont données à distance.

Juliette May : Est-ce qu’on n’observe pas quand même des résultats assez concluants ?

François Aubriot : Oui, effectivement, il y a quand même de bons résultats et fort heureusement. À ce niveau-là, d’ailleurs, on peut distinguer l’école primaire et le collège ; à l’école primaire une institutrice ou un instituteur et, au collège, plusieurs professeurs dans différentes matières. En tout cas, on s’aperçoit qu’il y a quand même actuellement une très forte volonté des professeurs pour essayer d’assurer cette continuité pédagogique en utilisant ces moyens informatiques qui sont mis à disposition, mais, malheureusement, qui ne sont peut-être pas mis à disposition de façon très concertée avec l’académie. Je pense qu’on aurait beaucoup à gagner d’avoir des directives, en tout cas un cadre qui soit donné pour ces professeurs de façon à ce qu’ils puissent utiliser des outils dans le cadre de cette continuité pédagogique.

Juliette May : On entend parler en ce moment d’un certain capitalisme numérique qui est en train de gagner du terrain. Quel est votre avis à ce sujet ?

François Aubriot : C’est une question qui est un petit peu triviale. Je ne pense pas qu’on puisse vraiment parler de capitalisme numérique si ce n’est, peut-être, à l’égard des GAFAM qui sont largement contournables aujourd’hui avec justement des logiciels libres et de l’open source. Je pense qu’on avait une approche peut-être pas suffisamment orientée vers la transmission du savoir par rapport au numérique. Maintenant effectivement, avec cette période passée et qui va encore continuer quelque temps, je pense qu’on va être beaucoup plus sensibles à l’utilisation du numérique dans le cadre de l’apprentissage à l’école et au collège.
Je pense que, de toute façon aujourd’hui, les enfants n’ont pas attendu l’école pour utiliser du numérique que ce soit pour les jeux ou pour aller consulter des vidéos, sachant qu’il serait quand même important de leur expliquer de quelle façon ils pourraient le faire tout en respectant des enjeux qui sont très importants en ce qui concerne leur vie privée et leurs données personnelles, chose qui ne sont pas, bien entendu, abordées au niveau de l’Éducation nationale.

Juliette May : Est-ce que vous trouvez que le numérique alimente l’avènement du stay home pour le travail et l’éducation, même au-delà du confinement ?

François Aubriot : Je ne sais pas si nous sommes réellement arrivés à un avènement du stay at home pour l’apprentissage, que ce soit dans le cadre de l’école et on peut également extrapoler au télétravail.
En tout cas, on s’aperçoit qu'il est possible aujourd’hui, pour l’apprentissage, d’utiliser des outils numériques de façon à renforcer ses apprentissages. Moi je reste quand même convaincu que l’apprentissage dans une salle de cours. avec un professeur et d’autres élèves. reste tout à fait pertinent.
En ce qui concerne le côté professionnel, on s’aperçoit aujourd’hui qu’il y a quand même pas mal de fonctions qui peuvent être faites, en tout cas assurées à distance ; en tout cas j’espère que ça viendra renforcer les volontés des entreprises pour mettre en place on va dire plus simplement, plus facilement, du télétravail quand celui-ci est possible et, bien entendu, avec des logiciels libres et de l’open source, chose qui est très importante pour la sécurité, la souveraineté, les données et le contrôle.

Juliette May : Merci François et bonne continuation.

François Aubriot : Merci Juliette, également, et une bonne journée à tous les auditeurs et les auditrices de Lyon Demain.

Juliette May : Le numérique semble donc indispensable, en tout cas en ce moment, mais n’exclut pas un usage plus raisonné et plus prudent, notamment quant à la protection des données personnelles. La Dane Lyon, Délégation académique au numérique éducatif, a d’ailleurs mis en place avant le confinement une instance PeerTube3 qui s’appelle tout simplement Tube4 et permet aux professeurs de partager leurs cours et leurs capsules vidéo sans l’utilisation du géant YouTube.