La Bulgarie avance vers une informatique plus libre et plus loyale en faveur de l'intérêt général

Le 1er juillet 2016, une série d'amendements à l' « E-governement Act » bulgare de 2007 est entrée en vigueur. Un des articles ainsi créé, le 58a., constitue une véritable avancée en assurant aux administrations de pouvoir librement modifier et partager les logiciels développés pour elles et en créant un dépôt national public pour valoriser ces ressources.

Art. 58a. (Nouveau, applicable au 01/07/2016)
Lors d’appels d’offre techniques et fonctionnels pour les marchés publics visant le développement, la mise à jour ou la mise en oeuvre de systèmes d’information ou de e-services, les autorités administratives doivent inclure les exigences suivantes :
1.Lorsque l’objet du contrat [du marché public] inclut le développement de logiciel :
a) les programmes doivent répondre aux critères des logiciels open-source ;
b) tout droit d’auteur et droit voisin des programmes, du code source, des interfaces et bases de données qui sont produits dans le cadre de la réalisation de l’appel d’offre doivent être livrés dans leur entièreté sans limitation d’utilisation, de modification ni de distribution ;
c) le développement doit être réalisé dans le dépôt maintenu par l’Agence [de « Gouvernance Électronique »] selon les termes de l’article 7c alinéa 18 ;

Traduction réalisée à partir d'une traduction automatisée en anglais du texte intégral

Notons que l'article 65 alinéa 30 de la loi énonce (traduction April) :

 Un « logiciel open-source » est un logiciel dont les codes sources sont disponibles publiquement et gratuitement et sur lesquelles les droits d'accès et de modification sont soumis aux conditions prévues par l'ayant-droit. 

Depuis le 1er juillet 2016, les logiciels développés pour les administrations bulgares doivent respecter des conditions qui permettront l'accessibilité de leurs codes sources, sous des licences qui garantiront ces administrations contre l'enfermement technologique tout en permettant la mutualisation des développements et des ressources. La création d'un dépôt public national dont il est mention au point c) est, dans cette perspective, une initiative très prometteuse.

L'April salue la disposition adoptée par le législateur bulgare sous l'impulsion de Bozhidar Bozhanov, informaticien et conseiller du Vice-Premier ministre bulgare depuis 2015. La comparaison avec le simple encouragement au logiciel libre prévu à l'article 9 ter du projet de loi numérique français, et avec la timide reconnaissance à l'article 1er bis du caractère communicable des codes sources des logiciels des administrations limitée par une exception disproportionnée en cas de risque pour la sécurité des systèmes d'information, révèle la différence d'ambition politique sur ce sujet.

Bien sûr, aussi engageante soit-elle, la disposition n'est pas exempte de points d'amélioration potentielle :

L'April observe ainsi qu'une référence au logiciel libre et sa définition aurait été plus ambitieuse. Le message aurait été plus fort, plaçant les notions de liberté et d'intérêt général au centre des considérations. En outre, puisque le texte mentionne les « critères des logiciels open-source », une référence explicite aux critères de l' « Open Source Initiative », aurait pu être plus appropriée. La formulation retenue dans la loi bulgare résulterait-elle de la complexe réalité de l'écriture législative et des tractations y affèrant ?

L'April remarque également que cette disposition ne vise que le développement et non l'acquisition en général des logiciels par les administrations. Peut-être qu'une solution, plus large, basée sur une priorité au développement en interne et à la mutualisation entre administrations, à l'instar de ce qui est prévu en Italie ou comme ce que l'on rencontre dans le projet sourcecode.cio.gov américain, aurait été plus pertinente ?

Toutes ces réflexions trouveront certainement leurs réponses dans la mise en oeuvre pratique de ce texte. L'article 58a. instaure à cette fin un cadre très favorable au développement d'une architecture logicielle plus libre et plus loyale en faveur de l'intérêt général. Dans cette optique le rôle de l'Agence de Gouvernance Électronique nouvellement créée et de son directeur, ainsi que celui du décret d'application en Conseil des Ministres prévu à l'article 43 (2) - qui devra entre autre préciser la mise en oeuvre du critère d'interopérabilité - seront prépondérants dans le succès des ambitions affichées par ce texte.