L'April demande la suspension de la renégociation du contrat Microsoft-Défense et la transparence autour de ce dossier

Paris, le 6 février 2013. Communiqué de presse.

PC INpact a révélé mardi 5 février 2013 la renégociation en cours de l'offre « Open Bar » de Microsoft au Ministère de la Défense. Le contrat initial a été passé en 2009 sans appel d'offres et présente de nombreux abandons des principes relatifs aux achats publics. L'April demande la suspension de cette renégociation et la transparence autour de ce dossier.

L'Open Bar, ou Microsoft à tous les étages

En 2009, le Ministère de la défense signait avec Microsoft un accord-cadre qui a été surnommé « Open Bar ». Cet accord-cadre permettait, pendant toute la durée du marché (4 ans), un droit d’usage d’un certain nombre de produits Microsoft et de services associés. En fin de marché, le contrat permettait de lever une option d’achat pour l’acquisition de l’ensemble des logiciels. Cet accord-cadre avait été signé par la direction interarmée des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'information (DIRISI) avec la société Microsoft Irlande pour une partie et Microsoft France pour une autre partie. L'accord prévoyait également la création d'un centre de compétences Microsoft (CCMS) situé dans les locaux même de la DIRISI.

« Le contrat initial avait été passé sans appel d'offres, ni procédure ouverte dans le cadre des règles d'achat public. Il n'est pas acceptable que le Ministère de la Défense ait visiblement contourné les grands principes des marchés publics, comme la transparence et l'égal accès à la commande publique, pour donner les manettes à Microsoft dans le schéma directeur du ministère » a déclaré Jeanne Tadeusz, responsable des affaires publiques.

En 2010 l'Aful avait écrit à des parlementaires et une question parlementaire écrite avait été adressée au Ministre de la Défense concernant les problèmes posés par cet accord-cadre1.

Dans sa réponse à la question parlementaire, le ministère indiquait notamment « Ainsi, la première version de cette architecture logicielle est principalement issue de solutions propriétaires et elle tire profit de l'accord-cadre passé avec Microsoft. Mais une autre version, composée sur la base de solutions open source, sera disponible dès 2011 et déployée parallèlement à la première. Les retours d'expérience dont bénéficiera le ministère de la défense sur l'utilisation en parallèle de ces différentes solutions par différentes populations d'utilisateurs éclaireront les décisions à prendre à l'avenir. »

Cela a-t-il été fait ? Quels sont les retours d'expériences ? La direction interministérielle des systèmes d’information et de communication (DISIC), qui n'existait pas en 2008, a-t-elle été consultée sur le renouvellement du contrat et quel est son avis ?

« Il serait également intéressant de connaître l'impact de cet accord pour les fournisseurs de solutions libres. Le Ministère de la Défense est-il devenu un théâtre d'opérations réservé à Microsoft, exilant les acteurs libristes ? » a déclaré Frédéric Couchet, délégué général de l'April.

Un Open Bar dangereux pour la santé des administrations et pour le logiciel libre

L'article de PC INpact de mardi confirme que la commission des marchés publics de l'État avait été saisie en 2008 pour avoir un avis de conformité. PC Inpact publie l'avis du rapporteur de la commission. Dans ce document édifiant, le rapporteur évoque la position dominante de Microsoft et ses dangers, la condamnation par la Commission européenne, les doutes sur la légalité de la procédure de normalisation du format de fichier OOXML, l'usage du dépôt de multiples brevets européens par Microsoft pour préserver sa position dominante sur le marché, les risques du contrat pour le développement du logiciel libre…

Sous des termes choisis, ce document est une dénonciation factuelle du projet d'accord-cadre et des pratiques de Microsoft. Dans ses conclusions, le rapporteur indique que « le présent dossier n’est qu’une partie émergée de l’iceberg des relations entre l’administration française et MICROSOFT, relations qui relèvent maintenant d’enjeux d’ordre politique et éminemment conflictuels, marquées par la puissance économique et financière de MICROSOFT ».

Cette dépendance du Ministère de la Défense envers la société Microsoft est d'autant plus inacceptable que la Gendarmerie Nationale utilise avec succès des logiciels libres pour assurer son indépendance informatique.

Pour une cure de désintoxication et le respect des demandes du Premier ministre

Fin septembre 2012 était publiée la circulaire Ayrault sur l'usage du logiciel libre dans l'administration. Cette circulaire visant les services informatiques de l’État, son respect impose naturellement la suspension de la renégociation du contrat et la transparence autour de ce dossier. « L'April encourage le gouvernement à la mise en place d'une vraie politique publique en faveur du logiciel libre. Cela passe donc par une négociation transparente et ouverte à tous avant qu'un tel contrat ne soit passé, c'est pourquoi l'April appelle le gouvernement à suspendre la procédure en cours afin de repartir sur de meilleures bases » précise Lionel Allorge, président de l'April.

À propos de l'April

Pionnière du logiciel libre en France, l'April est depuis 1996 un acteur majeur de la démocratisation et de la diffusion du Logiciel Libre et des standards ouverts auprès du grand public, des professionnels et des institutions dans l'espace francophone. Elle veille aussi, dans l'ère numérique, à sensibiliser l'opinion sur les dangers d'une appropriation exclusive de l'information et du savoir par des intérêts privés.

L'association est constituée de plus de 5 000 membres utilisateurs et producteurs de logiciels libres.

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Contacts presse :

Frédéric Couchet, délégué général, fcouchet@april.org +33 6 60 68 89 31
Jeanne Tadeusz, responsable affaires publiques, jtadeusz@april.org +33 1 78 76 92 82