Migration informatique à la Ville de Marseille : le nouveau directeur des systèmes d'information renverse-t-il le politique ?

Marseille, le 19 octobre 2010, communiqué de presse.

Alors que la migration de la Ville de Marseille vers un système libre était sur le point d'être réalisée suite aux études de l'équipe en place, le changement de DSI a stoppé net des efforts de plusieurs mois pour imposer ses choix personnels. L'April et Libertis dénoncent des choix illégaux et autoritaires, qui vont à l'encontre des intérêts de la ville et des contribuables marseillais.

Depuis 2009, la ville de Marseille se préparait à migrer son parc informatique vers des postes de travail basés sur des systèmes d'exploitation libres. D'après les informations que l'April a collectées, cette migration a fait l'objet d'un travail préparatoire minutieux. Alors que tous les indicateurs étaient au vert, la mise en application de cette décision a été renversée cet été par la décision du nouveau DSI (Directeur des Systèmes d'Information) de la Ville, Jean-Marie Angi.

Aucune raison technique valable n'explique une telle décision. Dans un document qui a fuité dans la presse récemment, le DSI tente de justifier bien maladroitement sa décision en ânonnant des contre-arguments :

  • Contrairement à ce qu'il prétend, faire le choix du Logiciel Libre c'est faire le choix de la pérennité : ses licences garantissent que, quels que soient les prestataires choisis, l'utilisateur reste maitre de ses logiciels. Dans ces circonstances, le DSI refuse des logiciels dont la pérennité est garantie par leurs licences en optant pour un système d'exploitation propriétaire, dont la version précédente n'a pourtant été poussée par son éditeur que pendant deux ans. De plus, l'argument de la pérennité des choix informatiques avait guidé en son temps les migrations des postes de travail d'institutions telles que l'Assemblée Nationale ou la Gendarmerie vers des solutions libres.
  • Les systèmes d'exploitation libres offrent un choix varié d'interfaces utilisateur. Comme le mettait en lumière le travail préalable réalisé par les services techniques de la ville, les conséquences des changements d'usage induits par le passage aux logiciels libres sont moins complexes pour les utilisateurs que celles des migrations entre deux systèmes d'exploitation propriétaires, voire que celles entre deux systèmes d'exploitation propriétaires d'un même éditeur.
  • Alors qu'un travail préparatoire effectué par les équipes techniques avait permis de trouver des solutions techniques pour assurer la compatibilité des applications métiers, rien de ceci n'a été réalisé concernant la plateforme propriétaire finalement/actuellement retenue par la ville. Dans la mesure où ces logiciels n'ont pas été qualifiés par leurs éditeurs pour la plateforme finalement désignée unilatéralement par le DSI, le risque d'incompatibilité est très élevé et pourrait entraîner de nombreuses conséquences désastreuses pour la collectivité.

Ces éléments laissent évidemment penser que, contrairement à ce qu'il affirme, ce n'est pas réellement un « objectif de rationalisation » qui gouverne les choix du DSI de Marseille. Celui-ci a en effet imposé son choix de la marque et du modèle de système d'exploitation avant même d'annoncer ne serait-ce que la mise en place de l'étude préalable. C'est en tout cas ce que confirme ce document, signé de Jean-Marie Angi, daté du 22 juillet 2010.

« Alors que Marseille et sa région ont la chance d'accueillir de nombreuses entreprises spécialisées dans le Logiciel Libre, une technologie non discriminante, le nouveau DSI de la ville a choisi de leur interdire de répondre au marché pour favoriser les intérêts d'une firme américaine », déclare Jean-Michel Armand, président de Libertis, l'association des entreprises spécialisées en Logiciel Libre de la région PACA.

En outre, l'élu référent sur ce dossier ne semble pas avoir été tenu informé de cette décision1. Les risques pris par le nouveau DSI sont pourtant très importants, entre autres parce que sa décision est illégale au vu du Code des marchés publics. En effet, alors qu'il est autorisé de demander l'usage d'une technologie libre dans le cadre d'un marché public2, faire le choix d'une marque particulière est strictement interdit par le Code des marchés publics3.

« Alors que le Logiciel Libre met tous les prestataires sur un pied d'égalité, limiter son choix à un petit groupe d'acteurs qui construisent leur monopole autour d'une marque propriétaire exclut de fait les entreprises proposant des solutions basées sur d'autres systèmes d'exploitation. Cette décision illégale va à l'encontre de l'intérêt des contribuables marseillais : l'offre mise en avant par cette décision arbitraire est sans aucun doute moins performante et plus coûteuse pour la collectivité » ajoute Tangui Morlier, président de l'April.

À l'image des migrations OpenOffice.org4 ou de la libération d'Allo-Mairie5 qui ont été entreprises par la direction précédente, l'April et Libertis appellent les élus marseillais à s'emparer du dossier pour que la gestion de l'informatique de la ville cesse d'être illégale et arbitraire et fasse l'objet de vraies décisions politiques.

Pour plus d'informations voir la chronologie des actions menées par l'April sur les changements de décisions à la ville de Marseille.

À propos de Libertis

Créée en 2004, l'association LIBERTIS a pour vocation de regrouper des sociétés de services ayant fait leurs preuves au sein du modèle libre, aptes à procurer à leurs clients des services de qualité.

LIBERTIS compte actuellement plus de 35 membres en PACA (éditeurs, intégrateurs, SSLL, hébergeurs...) et a organisé l'an dernier le premier TopTIC au sein duquel se tenait le troisième SPLLOS (Salon Professionnel des Logiciels Libres et Open Source) à Marseille.

Parmi les nombreux projets de 2010 :

  • organisation du salon TopTic le 12 octobre au Pâlais de la Bourse à Marseille en partenariat avec medinsoft, medmultimed, la chambre de commerce , le PRIDES et le Pôle SCS,
  • troisième édition de la Nuit des Technos le 14 octobre à la Friche de la Belle de Mai
  • animation de petits déjeuners thématiques
  • collaboration avec les autres clusters Logiciels Libres en France, notamment Alliance Libre dans la région nantaise et l'ensemble des association du monde du Libre
  • faire vivre la fédération nationale du libre crée le 16 février 2010 avec 10 autres associations régionales d'entreprises du libre

Contacts presse :

Jean-Michel Armand, président jmarmand@hybird.org +33 6 47 88 26 85

À propos de l’April

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L’association est constituée de plus de 5 500 membres utilisateurs et producteurs de logiciels libres.

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